Aux barricades, Parisiens!

Paris brûle-t-il ? Cette phrase est attribuée à Hitler, qui, aux abois dans le Repaire du Loup, sentant le contrôle des événements lui échapper, avait donné l’ordre au général Choltitz, responsable de la capitale française, de réduire celle-ci en cendre en procédant au minage de tous les ponts et de tous les grands monuments de la capitale. Sur la base de cet ordre désespéré, Dominique Lapierre et Larry Collins ont fait de la libération de Paris un récit palpitant qui fut, dans les années 60, un succès mondial.

Quelque 60 ans plus tard, ce livre est toujours aussi captivant. La Deuxième Guerre mondiale reste, malgré son horreur ou à cause de son horreur, un sujet fascinant. Par ailleurs, Paris aussi envoûte. Sa libération après quatre années passées sous la botte allemande constitue bien sûr un événement d’envergure. Et quand cette libération est le résultat du soulèvement de la population, lequel a forcé l’armée à entrer dans la ville plus tôt que prévu pour éviter le massacre de cette population, l’histoire devient envoûtante.

Les auteurs ont su donner au récit le rythme stimulant d’un véritable roman policier. Les recherches colossales qui ont permis de suivre, à l’heure près, le fil des événements des quelques derniers jours précédant le soulèvement populaire assurent la pertinence du contenu. Les centaines de personnes qui ont témoigné de leur vécu au cours de cette fin d’août 1944 permettent d’incarner les faits, de nous rendre sensible cette page d’histoire. Choltitz leur a accordé de longues entrevues. De même pour le général Eisenhower. Mais aussi les témoignages verbaux de tant d’autres, gradés, simples soldats ou civils ayant vécu ces jours de feu, de poudre et de colère. Et c’est finalement cette parole qui donne toute la saveur et toute la valeur à l’ouvrage.  

Extrait

 Les premières salves d’obus firent une impression terrifiante sur les insurgés. Derrière leurs sacs de sable dérisoires, avec leurs mitraillettes, leurs mousquetons et leurs pistolets, ils savaient qu’ils ne pourraient opposer qu’une résistance symbolique à l’assaut allemand. Ils seraient tous massacrés. Nombre de policiers, subitement gagnés par la peur, décidèrent alors d’abandonner leur position, de fuir. L’abbé Robert Lapoutre, qui était devenu leur aumônier, les vit s’engouffrer par dizaines dans les escaliers du souterrain qui communiquait avec la station de métro Saint-Michel sur la rive gauche de la Seine. (p.154)

Dominique Lapierre, Larry Collins, Paris brûle-t-il ? Ce jour-là 25 août 1944, Robert Laffont, 1964, 462 pages