Un apprivoisement

Noémi et les grandes personnes de Marilène Clément est une histoire comme je les aime parfois, une histoire sans histoire. Pas de grosses péripéties, pas de drames, par de sang. Juste une petite fille aimée, mais un peu ballottée. Une maman et un papa aimants mais séparés, l’un en Angleterre, l’autre à Paris. Un beau-papa qui fait son possible. Et une dame qui se charge de la petite durant tout un été. Quelques mois dans la tête d’une petite qui tente de comprendre les grandes personnes et des grandes personnes qui tentent de bien prendre soin de l’enfant. Et sous ce quotidien fait de petites joies et de grandes peines, du passé refait surface et se pacifie. L’enfant aide les grands à grandir en définitive.

Le style de l’auteur est souvent poétique, mais peut-être un peu lourd à se vouloir littéraire. Marilène Clément s’amuse à jouer avec les temps de verbe d’une manière qui m’a un peu déstabilisée, passant du passé simple au présent ou au conditionnel dans un même segment temporel. Mais on s’y fait.

Extrait

Comme la veille, la crise éclata une fois Noémi couchée, dès que Bérangère eut tourné le dos. Elle dut de la même façon apaiser jusqu’à ce que la fatigue vînt à bout de l’enfant, passé minuit. L’infirmière regagna sa chambre, mécontente, écoeurée par tant de larmes chaudes. Décidément, elle ne possédait pas la fibre maternelle.

Pendant les trois jours qui suivirent, le scénario se déroula de la même façon. Noémi adore la tournée des malades, se fait des amoureux sexagénaires, boit des lampées de cidre et nargue le jars. Elle rentre affamée, ivre de chlorophylle, et mange comme quatre au déjeuner. Ensuite, jusqu’à la nuit, elle emplit le jardin de sa pétulance. Puis, son bonheur tombe, le chagrin monte comme la fièvre de Malte qui récidive chaque soir.

Pas un grand roman, mais un vrai plaisir de lecture, suffisant pour donner le goût de lire quelque chose d’autre de cette autrice de romans, d’histoire, d’essai, de littérature pour enfant et pour la télévision.

Marilène Clément, Noémi et les grandes personnes, Gallimard, 1984, 246 pages