J’ai le grand bonheur d’être en résidence d’écriture chez des amis, à Saint-David-de-l’Auberivière, qui me prêtent leur nid pendant qu’ils bourlinguent en Méditerranée. Le bonheur et les tourments aussi. J’y ai terminé le manuscrit en chantier depuis presque deux ans et je l’ai transmis à mon éditeur, me croisant les doigts pour qu’il le juge digne de publication. Ça, c’est le bon côté des choses. Le tourment, c’est le nouveau roman dont j’ai entrepris l’écriture et dont je n’arrive pas à définir le ton. Écrire au « je » ou écrire au « il »? « Big problème », me direz-vous en levant les yeux au ciel. Sans espérer vous faire pleurer sur mon triste sort, faut que je vous dise que ça fait toute une différence, que le « je » commande un style plus simple, plus près du langage parlé alors que le « il » permet l’usage d’un langage plus littéraire, celui auquel je suis habituée. « En ce cas là, écris au “il”, pis fatigue-nous pu avec ça. » Ben… c’est que j’aimerais un peu sortir de mes ornières, expérimenter un autre style, et que je ne trouve pas ça évident. D’où les tourments, et d’où la promenade dans Saint-David, ce qui est, en fait, le véritable sujet de ce billet.


Avec un début de mai qui se prend pour l’été, faudrait être sans-cœur pour ne pas mettre le nez dehors. C’est ce que j’ai fait en allant me balader de l’autre côté du boulevard de la Rive-Sud, dans ce qui devait être le cœur de la ville de Saint-David-de-l’Auberivière. Du moins je l’imagine puisque l’église y trône sur le promontoire qui domine le fleuve.
J’ai arpenté d’est en ouest les rues qui me semblent principales. Rien. Aucune trace de ce qui devait bien être le carrefour où se croisaient les citoyens avant que toute l’activité commerciale et marchande ne se transporte sur le boulevard. Pas un café, pas un restaurant, pas une petite épicerie ou quincaillerie de proximité sur un kilomètre de long. À croire que la ville n’a jamais existé. De retour à la maison, des recherches sur internet me confirment pourtant la fondation d’une municipalité et d’une paroisse vers la fin du 19e siècle. Mes lectures m’ont aussi permis de satisfaire ma curiosité quant à son nom. L’abbé Joseph-David Déziel, fondateur et grand bâtisseur de la ville de Lévis, lui en a légué la première partie et Mgr François-Louis de Pourroy de l’Auberivière, 5e évêque de Québec, en explique la seconde. Tout un héritage!
J’y apprends enfin que Saint-David fusionne avec Lévis en 1990, soit 12 ans avant la grande vague de fusions de 2002 qui allait faire de Lévis une ville longitudinale et hétéroclite.
Dès 1991, le cimetière était cédé à celui de la corporation Mont-Marie (Lévis); en 1992, la paroisse était fusionnée à la celle de Saint-Joseph-de-Lévis et en 1996, le « modeste » presbytère était vendu à une entreprise funéraire. Tout était consommé.

Ce qui frappe aujourd’hui, quand on se balade à pied dans l’ancienne ville, c’est l’absence de ces lieux de rencontre qui tissent et solidifient la trame d’une communauté. Comme l’avenue Bégin, à Lévis, la rue Cartier ou la rue Saint-Jean à Québec, pour ne donner que quelques exemples. Comment se traduit le sentiment d’appartenance de ces « Lévisiens »? Où vont-ils siroter leur café du dimanche matin? Et lécher leur crème glacée des beaux soirs d’été? Sur quelle terrasse prennent-ils une bière fraîche tout en regardant flâner les badauds? Dans le vieux Lévis ou le vieux Québec? Ou restent-ils chez eux?


De petit village à modeste ville, Saint-David a maintenant tout à fait l’allure d’une banlieue, un endroit où l’on dort, où l’on mange, mais dont on sort pour travailler et s’amuser. Formée d’un vieux quartier et de nouveaux lotissements, elle est balafrée par le boulevard de la Rive-Sud qui court de Lévis jusqu’au pont de Québec, déprimant de laideur, et qu’on traverse à ses risques et périls si la prochaine traverse piétonnière est trop loin.
Dans la vieille ville, des rues gardent pourtant le charme d’un riche patrimoine couvrant plusieurs siècles et autant de styles architecturaux. Qui sait si le secteur ne pourrait pas s’éveiller sous l’impulsion de quelques commerçants bien avisés qui sauraient mettre en valeur son petit air villageois et son incroyable vue sur le fleuve et ramener la vie dans ses rues?


Merci pour la jolie ballade et la réflexion! Cela te donnera peut-être le goût d’écrire au « je »!
Merci Denyse. Mais à la réflexion, j’ai opté pour le il. Je viendrai peut-être, même sûrement au je un jour, mais je vais attendre d’avoir plus de métier.
Au plaisir de me balader avec toi dans Paris!
Bonjour Carmen,
Merci pour cette petite visite. C’est très intéressant et nous donne le goût d’aller y faire un tour. Il me semble que ça fait longtemps qu’on n’a pas manger ensemble et fait un petit jasette. Au plaisir d’avoir de tes nouvelles,
Danielle
Bonjour Carmen,
Tu pourras écrire au IL mais je pense que tu es très près de l’écriture au JE. Cela dit, St-David je connais, j’y suis restée toute petite et j’ai de la famille qui y habite. Ton texte est très vrai, relié à la réalité de ce coin. Bye et au plaisir.
La curieuse construction, comme tu dis est le fabuleux Château Boisvert construit par un brillant inventeur nommé William Raphaël Boisvert…il est bien beau d’écrire mais encore faut-il s’instruire 🙂
Merci Madeleine pour cette information. J’ai mis du temps à comprendre que ton commentaire référait à mon article sur Saint-David.
Je suis native de Saint-David mes grands-parents demeuraient face au parking de l’église la maison blanche avec le drapeau du Canada . C’est là que tout les dimanches notre famille ce réunissait .
Bonjour, vous avez raison pour le triste manque de commerces ici. J’habite une maison à côté de celle en jaune que vous avez pris en photo. Chez moi c’était anciennement le premier magasin général de St-David. Par contre, je dois vous dire que c’est un secteur agité où je vois un nombre impressionnant de piétons et d’automobiles. C’est vraiment achalandé à des heures plus précises, mais je vois des gens en tout temps.
Bonne journée 🙂