Eau

J’écrivais dans un récent article que j’aime l’eau plus que tout, consciente de ne soulever que la goutte d’un sujet vaste comme l’océan. Il faudra un jour que je m’explique. Car plusieurs savent que je ne suis pas faraude dans les rapides ou les vagues trop musclés! Un jour, donc, je parlerai de la rivière de mon enfance, avec ses eaux rougeâtres et tièdes et ses méandres que nous suivions jusqu’à la limite interdite des terres du voisin. J’en dirai les plaisirs de la baignade, son gazouillis infatigable comme écran sonore à nos jeux, ses herbes, ses cailloux, et ses broussailles. Les imageries fantastiques dont elle était le fond de scène.

Je parlerai de toutes ces eaux charrieuses d’émotions. Les eaux d’ici. Les rivières encastrées de végétation du Nouveau-Brunswick où j’ai pêché mes premières truites. Les lacs noirs des Laurentides et de la Côte-Nord qui invitent à la contemplation. Le grand fleuve qui miroite sous le soleil à la hauteur de Port-au-Persil et qui s’élargit à en perdre son nom, à nous perdre en lui, à mesure qu’on descend vers son embouchure. Les eaux du fjord qui pulsent du souffle des baleines.

Et les eaux d’ailleurs. Les eaux agitées du Grand Canal dans lequel tremblotent sans fin les palais vénitiens aux couleurs délavées. Les eaux dormantes des petits canaux tapis dans l’ombre d’un passé glorieux. Le ruban brun du beau Danube bleu qui fait défiler la paisible campagne autrichienne. La Seine, mythique, toute de refrains et d’airs d’accordéons habillée. La Dordogne sur laquelle nous glissons entre ses bras verts et ses vieux châteaux accrochés aux falaises. La Tamise, flegmatique et froide. Le Yangtsé qui charrie dans l’indifférence ses sédiments, ses cadavres et son charbon.

Et les eaux des mers qui remuent leur vague à l’âme, par gros rouleaux dolents ou l’écume à la gueule. Pacifique en colère, embruns de la Côte d’Émeraude bretonne, clapotis des calanques de la côte marseillaise, eaux turquoise et chaudes de la Floride…

Oui, il faudra que je parle de l’eau. Des eaux. Qui reflètent et qui prolongent les eaux secrètes des origines dont nous gardons une éternelle nostalgie.

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