Oui, je l’avoue, je regarde Tout le monde en parle, le dimanche soir, sur mon ordinateur, pendant que mon mari s’adonne, de son côté, au plaisir du football. C’est mon moment de rigolade de la semaine. Et parfois d’émotion. Rarement d’écœurement. Mais ce soir, j’ai reçu la chose en pleine gueule.
J’étais allée rejoindre mon homme et admirer les colosses des Steelers, le temps que Jean Charest régurgite ses menteries répétées ad nauseam. Malheureusement, je suis revenue trop vite. Il parlait encore. Parler, est-ce le bon mot? Il radotait, comme un vieux disque qui saute, les arguments mille fois entendus, triste pantalonnade qu’il joue avec l’énergie du désespoir pour nous faire croire à sa bonne foi. Mais avec cette lassitude dans la voix, dans le visage, dans le corps qui se tasse chaque jour un peu plus sur lui-même. Les invités ont martelé les mêmes questions, sur les mêmes sujets – commission d’enquête sur la corruption du monde de la construction, moratoire sur l’exploitation des gaz de schiste –, qui lui sont posées tous les jours, par tous, sauf par les gens de son parti (quoique, dans l’ombre des officines, peut-être y en a-t-il pour oser, parfois, émettre l’ombre du début d’un doute…).
J’avoue avoir éprouvé un malaise de voir un chef d’État se prêter à cet exercice dont le résultat ne pouvait être qu’avilissement. Espérait-il vraiment redorer une image ternie au possible en participant avec une évidente répugnance à ce talk-show?
Une partie importante de la population assiste à cette grand-messe du dimanche soir. Elle est parfaite pour lancer des disques, des livres, des spectacles. Mais les politiciens y ont-ils vraiment leur place? Ne renforcent-ils pas l’impression du public, malheureusement déjà trop ancrée, voulant que tout ce qui est politique ne soit que bouffonnerie? Et le plus souvent une farce mauvaise dont il est le dindon?
Pour couronner le tout, poussant l’abaissement à son comble, le PM s’est incrusté jusqu’à la fin de l’émission, essuyant encore quelques sarcasmes, l’air profondément ennuyé, voire dégoûté.
Ce genre de numéro n’a rien à voir avec un sain exercice d’autodérision. Non. La scène tient de l’aveulissement et de l’imploration de qui ne peut renoncer au pouvoir. Elle serait comique si elle n’était si triste, indigne et déprimante. J’aurais dû rester plus longtemps au salon. J’aurais préféré ne pas assister à cela.